François ARAGO (1786-1853)

Il est né Estagel, dans un petit village proche de Perpignan (Catalan un jour, troubadour pour toujours) dans lequel il intègre le lycée public qui porte maintenant son nom.

Le 26 juillet 1830, après la mort de Fresnel, Arago fait son éloge à l’Académie des Sciences en précisant les différences perçues entre les deux théories de la lumière à l’époque, la théorie corpusculaire et la théorie ondulatoire.

Après avoir étudié les propriétés des rayons lumineux, Arago se demande comment exprimer la nature de la lumière sachant que cette question a donné lieu à de « vifs débats » parmi les hommes.

Deux modèles physiques se partagent l’explication conceptuelle des phénomènes naturels :

  • L’odeur : Le comportement des particules odorantes comme de « subtiles émanations qui pénètrent dans toutes les parties » d’une pièce ;
  • Le son : La constatation de la propagation sonore issue de la perturbation d’un milieu qui « éprouve un mouvement vibratoire qui se communique d’abord aux couches d’air voisines, et ensuite, de proche en proche, à toute l’atmosphère ».

Ainsi, le soleil projette des particules matérielles avec « une vitesse de 77.000 lieues par seconde et ce sont ces petits fragments solaires qui, en pénétrant dans l’œil, produisent la vision ». Ou bien le soleil est « semblable à une cloche » qui vibre et excite un « mouvement ondulatoire dans un milieu éminemment élastique dont l’espace est rempli. Et ces vibrations viennent, finalement ébranler notre rétine comme les ondulations sonores affectent la membrane du tympan ».

77.000 lieues par seconde : vitesse basée sur une ancienne définition de la distance. Le lieue, selon qu’il soit des ponts et chaussées ou métrique ou terrestre il compte respectivement (environ) 3,90 km ou 4,00 km ou 4,44 km.

Globalement, Euler et Franklin s’opposaient à la théorie de l’émission corpusculaire de la lumière selon Newton. En effet, un boulet de canon est un objet étudié par la théorie corpusculaire qui peut, sans nul doute, faire tomber les murs. Bien qu’un grain de lumière possède une masse très faible (la masse est considérée nulle de nos jours) mais une vitesse très élevée (640.000 mille fois celle du boulet), « des milliards de rayons lumineux, agissant simultanément, ne produisent aucun choc appréciable » sur un mur ou sur la rétine au fond de l’œil.

Découpe avec un laser

Les arguments en faveur de la théorie ondulatoire se basent encore sur l’analogie avec le son. Nous savions à l’époque que toutes les notes de la gamme dans l’air se déplacent avec des vitesses exactement égales. « Une inspection attentive des bords des ombres que produisent les satellites de Jupiter » et « l’observation des étoiles changeantes, a prouvé que tous les rayons colorés » se déplacent à égales vitesses. La réfraction (si la vitesse augmente, la réfraction deviendra plus petite et réciproquement une diminution de vitesse se manifestera par une déviation croissante) est également un moyen assuré pour comparer les vitesses de toutes sortes de rayons. Même avec cette technique, la vitesse de n’importe quelles sources lumineuses est la même soit 77.000 lieues par seconde. « Ce résultat est donc une conséquence mathématique du système des ondes. »  A l’inverse, en considérant la lumière comme composée d’éléments matériels, « elle se trouvera soumise à la gravitation universelle » et l’on devrait constater « une diminution graduelle de sa vitesse originaire » mais toutes les observations basées sur des étoiles de premières grandeurs révèlent une « parfaite égalité de vitesse ».

François Arago exprime que « le désaccord entre la théorie et l’expérience ne pouvait pas être plus manifeste, et dès ce moment, le système de l’émission semblait renversé de fond en comble ».

Le véritable mérite de l’expérimentateur consiste à dégager des phénomènes naturels, très complexes dans leur expression, une série de circonstances significatives permettant d’extraire et de saisir des lois. Grimaldi observa pour la première fois des phénomènes lumineux très singuliers qu’il nomma diffraction.

 Il suffit d’éclairer, avec un faisceau de lumière, un obstacle de petite taille ou simplement de faire passer le faisceau par un petit trou. L’ombre du petit objet éclairé se « montrera entouré de stries contigües, les unes très lumineuses, les autres complètement obscures ».

Lire ou relire la biographie de Thomas Young

Newton avait également reproduit l’expérience de Grimaldi en utilisant un petit trou circulaire. « Il crut y voir des preuves manifestes d’une action attractive et répulsive très intense, qu’exerceraient les corps sur les rayons qui passent dans leur voisinage » disait Arago.

Fresnel optimisa l’observation des phénomènes de diffraction. Au lieu d’utiliser un écran pour voir les bandes diffractées, il constate qu’elles se forment nettement dans « l’espace même » et qu’un « micromètre astronomique » permet d’en faire un fort grossissement. Avec les nouvelles méthodes d’observation, Fresnel constate qu’en utilisant un fil d’araignée ou un fil de platine les bandes diffractées sont parfaitement semblables. Et donc ? La masse des objets responsables des figures de diffraction n’ont pas d’influence ; finalement, la théorie corpusculaire de Newton ne peut plus tenter d’expliquer le phénomène. Rajoutons qu’un point lumineux à un centimètre de distance de l’objet provoque une déviation angulaire de 12 alors qu’avec une distance décuple (10 fois supérieure), la déviation angulaire est légèrement inférieure à 4. Tous ces résultats ne peuvent pas être conciliés avec l’idée d’une attraction, les expériences de Fresnel anéantissent complètement la conception corpusculaire de la lumière. La lumière n’est donc pas une « matière », c’est une onde. Et le système des vibrations se développera dans se sens pour aboutir à l’unification de la lumière visible et d’un spectre électromagnétique beaucoup plus étendue en matière d’onde différentiée.

Une nouvelle discipline de la physique émerge « de l’optique qui traite de l’intensité de la lumière réfléchie, transmise et absorbée par le corps : la photométrie ». Arago constate, à juste titre que « les lois générales et mathématiques presque complètement ….».

Arago expérimente une vie tumultueuse (point de vue géopolitique), catalan d’origine, il possède la rudesse pour endurer. Il travaillait avec Biot, Dulong, Ampère, Fizeau… Mais l’on sait également qu’il se posait des questions toutes philosophiques : « Est-il possible de vivre sur le soleil ? » Arago envisageait solidement la possibilité d’une « vie solaire »… Une cinquantaine d’années plus tard, C. Flammarion envisage la possibilité d’une vie planétaire (sur vénus, sur mars) mais certainement pas solaire. Et pourtant, l’on considère encore (à cette époque là) l’âge de la terre avec seulement quelques dizaines de milliers d’années. Même à la fin du XIX° s. les connaissances liées à la naissance de la Terre ou à la forme de l’univers sont très limitées. Fraunhofer est l’inventeur des réseaux permettant d’obtenir par interférences une définition très précise des différentes radiations lumineuses (raies les plus fines, analyse spectrale).